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Concurrence et bien-être social.

  • Maître Rafik Rabia
  • 20 déc. 2017
  • 14 min de lecture


Journée d’étude sur « le rôle de la concurrence dans la protection du pouvoir d’achat, la création et la préservation de l’emploi »

Alger, 19 décembre 2017





« Ce n'est pas de la bienveillance du boucher, du brasseur ou du boulanger que nous attendons notre dîner, mais plutôt du soin qu'ils apportent à la recherche de leur propre intérêt. Nous ne nous en remettons pas à leur humanité, mais à leur égoïsme ». Cette citation, tirée de l’ouvrage le plus célèbre d’Adam SMITH, Recherche sur la nature et causes de la richesse des nations, tend à mettre en exergue le fait que le succès de l’activité économique, dont résulte l’intérêt général, naît de l’addition des intérêts individuels et égoïstes.


L’intitulé de cette journée est, à mon estime, assez trompeur. Il l’est d’autant plus que la concurrence qui pourrait avoir un bienfait sur un marché ne peut se faire sans régulation. La concurrence non régulée peut créer des pouvoirs ou leur illusion qui influencent significativement les conditions de concurrence sur le marché. Les bouleversements économiques et les crises successives de 2007 et 2008[1] nous ont prouvés que la notion du marché qui s’auto régule n’est que pure utopie. Je dilue alors cette citation de Adam SMITH et la vertu qu’il prétend à l’égoïsme par une autre de Jérémy BENTHAM dans laquelle il dit « la morale n’est rien de plus que la régularisation de l’égoïsme ».


Le monde est en constante évolution, et les besoins du citoyen connaissent une croissance sans précédent. Le boom démographique, le vieillissement de la population et l’émergence de certaines technologies augmentent les besoins en consommation, internet, loisir soins et services en tout genre. L’homme post- moderne vit dans une telle immersion dans la consommation qu’il a du mal à cerner les contours. Il a tendance à devenir parfois dépendant de certaines habitudes alimentaires, vestimentaires ou comportementales qui le laissent sujet à toute consommation. Cette dernière est pour l’être humain l’exemple type du plaisir. Acheter pour se faire plaisir. Il s’agit, en quelques sortes, d’une auto gratification perpétuelle. Il est donc important de garder ce plaisir accessible à tout le monde par une mise en concurrence effective des opérateurs sur le marché.


La concurrence est un concept qui reflète un système dans lequel des opérateurs économiques exercent une pression mutuelle dans le but d’une maximisation des richesses. Elle doit atteindre un niveau dans lequel tout citoyen peut accéder simplement aux meilleurs prix, qualité des produits et services après-vente, par un arbitrage entre différents produits offerts.


Cependant, les opérateurs ne peuvent être réduits à de simples destinataires des règles de concurrence. Il s’agit, en réalité, des premiers bénéficiaires d’une régulation du marché. Les entreprises créent et adaptent des besoins dans le but d’attirer des consommateurs, d’augmenter leur part de marché et d’accroitre leur richesse. Ces dernières doivent trouver des conditions saines dans lesquelles elles pourront faire évoluer leurs stratégies respectives de développement, en créant de nouveaux secteurs et de nouveaux emplois. Le but du droit de la concurrence ne peut, dès lors, se résumer à un bienfait du consommateur. L’équilibre concurrentiel est un concept qui tend assurer, au-delà du bien-être du consommateur, un bien-être social que constitue le consommateur, l’entreprise et l’emploi.


La concurrence qui fera l’objet de notre intervention, et je pense, sans vouloir parler au nom de mes collègues, l’objet de toute notre journée d’étude, est bien évidemment celle par laquelle, grâce à la vigilance du Conseil de la concurrence, on assure un équilibre concurrentiel et, par conséquent, le bien-être social.


Une précision sémantique me semble toutefois opportune. L’objectif du Conseil de la concurrence est d’assurer un marché dans lequel la concurrence est saine et non faussée. La notion de la loyauté de la concurrence ne trouve aucune place dans son exercice. La concurrence déloyale renvoie vers une autre opération. Il s’agit des règles qui tendent à régir des comportements civils entre entreprises, à l’image du parasitisme et du dénigrement. Leur contrôle reste du ressort exclusif des juridictions commerciales.


Il faudrait, toutefois, aborder cet objectif de bien-être social de son côté pratique. Autrement dit, sur la pratique du Conseil dans la préservation de ce bien-être social. L’atteinte à la concurrence, qui est la situation que le Conseil de la concurrence tend à appréhender, doit être appréciée en fonction de la finalité même de la concurrence. Cet exercice, qui parait simple de prime abord, se retrouve plus complexe à mettre en œuvre. Plusieurs écoles se sont confrontées pour faire primer leurs finalités respectives[2]. Le consommateur et l’entreprise, malgré l’absence d’objectif direct les concernant, trouvent, malgré tout, une place prépondérante (I). Ceci dit, l’emploi reste le point de controverse de la doctrine. La concurrence revêt de cette présomption de destruction d’emploi.


Si, aujourd’hui, nous vivons dans un monde où les voitures obéissent à nos moindres désirs, les ordinateurs se substituent à plein de nos taches et un téléphone qui fait office de couteau suisse, c’est bien grâce à la concurrence. Les opérateurs économiques ont compris, depuis longtemps, que la concurrence par le seul prix n’est pas une solution pérenne pour une maximisation des richesses. Il fallait se démarquer par autre chose que le prix. Les entreprises ont, donc, entrepris une démarche vers une innovation de plus en plus rapide offrant un maximum de nouveaux produits. Des marchés se créent et disparaissent en fonction de l’obsolescence des produits. Il arrive que cette innovation ne touche pas directement le produit mais plutôt le processus de fabrication. Cette efficience entraine une baisse considérable des coûts de production. L’innovation peut entrainer la disparition de certains métiers qui constituent le maillon dans la chaine de production. C’est à partir de ce postulat que les observateurs portent un regard sévère sur la concurrence. Une lecture technique de l’application des règles de concurrence démontre le grand apport de la concurrence dans la création et la préservation de l’emploi (II).


I- L’analyse téléologique de la concurrence


Quelle finalité pour la concurrence ? Le consommateur est considéré comme l’objet de convoitise des opérateurs, celui qui doit être séduit, manipulé, ensorcelé par des publicités, photos, musiques entrainantes. En réalité, les grands penseurs des différentes écoles économiques ne lui laissent pas une place prépondérante. Leur but est l’atteinte d’une situation d’équilibre concurrentiel. Cependant, par l’application de toute ces finalités économiques, le consommateur finit par surgir comme la principale occupation des autorités de la concurrence (B). Cet objectif de bien-être du consommateur se retrouve et se réalise à travers un mécanisme indirect qui favorise l’entreprise, un autre maillon du bien-être social, dans sa recherche d’une maximisation des richesses (A).


A : La protection indirecte de l’entreprise


L’atteinte à la concurrence est une notion qui doit s’analyser à partir des finalités de la concurrence. Son appréciation doit se baser sur les restrictions qui empêchent et ralentissent les objectifs vers lesquels tendent les règles de concurrence. Liberté d’entreprendre, protection du concurrent, de la concurrence, l’amélioration de l’efficience économique, toutes ont eu leur part de défense par la doctrine.


Pour les ordo-libéraux, par exemple, la concurrence ne doit en aucun cas être déviée de son objectif premier qui est la protection de la liberté d’entreprendre face à l’excès de pouvoir. En analysant de plus près les conséquences d’une restriction de la liberté d’entreprendre, l’intérêt du consommateur resurgit avec une place de taille. Ils estiment, par exemple, que cette restriction de liberté peut avoir des conséquences significatives sur le consommateur en limitant son choix ou lui imposer des prestations accessoires ou dépendantes[3].


La concentration de marché peut s’avérer aussi dangereuse pour la concurrence que l’existence d’une position dominante. Un marché concentré est celui dans lequel la production est concentrée autour d’un nombre limité de producteurs. S’appuyant sur la théorie structuraliste de l’école de Harvard, le droit de la concurrence doit avoir comme premier objectif la préservation de la structure du marché. Plus le marché est concentré plus le choix est restreint. Il faut comprendre alors cette théorie comme un corolaire de la liberté d’entreprendre dans la mesure où le but est de déconcentrer le marché par le démantèlement des barrières à l’entrée[4]. Elle permet, d’une part, d’assurer un choix et des substituts au consommateur en cas d’une augmentation de prix ou de baisse de volume de production et, d’autre part, empêcher les comportements collusifs par une concertation des opérateurs.


La théorie qui a vraiment bouleversé la concurrence reste celle de l’école de Chicago qui met l’efficience économique comme objectif ultime[5]. L’efficience allocutive, connue sous le nom de l’efficience Pareto fait référence à l’équilibre dans lequel aucun individu ne voit sa satisfaction diminuée. Tout changement qui mène à ce résultat est souhaitable dès lors que la satisfaction d’au moins une entreprise est réalisée sans que celle d’autre entreprise soit réduite. L’efficience allocutive est atteinte lorsque chaque ressource est orientée, grâce au mécanisme de prix, vers son usage le plus valorisé. Toutefois, cette efficience au sens de Pareto n’est pas applicable dans une réalité économique. Une perte d’un chiffre d’affaires ou une croissance de part de marché ne peut qu’augmenter ou diminuer celle de l’autre. Dans le cas contraire, le Conseil serait en mesure de qualifier tout gains d’efficience comme non restrictif de concurrence.


L’efficience productive, quant à elle, signifie que les ressources existantes sont utilisées le mieux possible pour satisfaire les nécessités des individus. Autrement dit, l’existence d’efficience est synonyme d’absence de gaspillage des ressources permettant de produire à moindre coût. Enfin, l’efficience dynamique, une forme d’efficience mise en avant par l’école autrichienne, consiste à produire des gains en innovation, amélioration de production et l’apparition de nouveaux produits.

Il est vrai que les règles de concurrence ne peuvent en aucun cas avoir comme finalité la protection du concurrent. Il serait, toutefois, erroné de réduire l’entreprise à une simple entité à surveiller. Les règles de concurrence tendent en réalité à protéger l’entreprise et à pérenniser son existence sur le marché.


L’analyse de ces trois précédentes théories semble exclure le bien-être du consommateur des objectifs de la concurrence. Or, les praticiens du droit, et essentiellement du droit de la concurrence, tentent de justifier toute atteinte à l’un des principes de ces théories par l’effet sur le consommateur. Il serait possible de considérer que la protection du consommateur est une conséquence qui découle de la cause produite par une autre finalité.


B : Bien-être du consommateur : finalité « certaine » par ricochet


Dans l’analyse économique de la concurrence, l’impact d’un comportement sur le consommateur est la ligne conductrice à des dysfonctionnements plus graves. Toutes les atteintes à ces théories se matérialisent par un impact significatif sur le consommateur. Pour la liberté économique, le but est de permettre à tout opérateur d’accéder à un marché. Cela est synonyme d’une nouvelle pression concurrentielle qui pousse les opérateurs à se démarquer en proposant de meilleurs produits à des meilleurs prix. Il en est de même pour l’objectif de la structure du marché qui permet à un marché d’être moins concentré par le démantèlement des barrières à l’entrées, et éviter une augmentation de prix suite à des pratiques collusoires.


La nouvelle constitution Algérienne a érigé la protection du consommateur au rang de principe à valeur constitutionnelle au même titre que la liberté d’entreprendre. Cela ne peut être contradictoire dans la mesure où le deuxième est une garantie de la protection du premier. Par une liberté d’accès au marché et l’encadrement des excès de pouvoir, le consommateur ne peut que sortir vainqueur d’une bataille des « prétendants » dans leur course à la séduction du client.


Le consommateur est, en réalité, le curseur qui permet de détecter des problèmes plus graves. Si le prix est haut, la qualité est moindre en l’absence d’alternative au consommateur, c’est bien en raison de l’atteinte à l’un des trois objectifs à savoir, liberté d’entreprendre, concentration du marché et efficience économique.


Les règles de concurrence s’opposent à toute concentration économique qui porte atteinte à la structure du marché, ayant comme conséquence une restriction de concurrence. Elles acceptent, en revanche, toute concentration qui apporte une innovation technologique, gains d’efficience qui se répercute, in fine, sur un produit à prix réduit.


Toute concentration qui réduit le choix du consommateur ou risque de lui causer une augmentation de prix ou une baisse de qualité revêt une présomption d’illégalité. Les concentrations sont dangereuses pour le consommateur dans la mesure où elles concentrent le marché. Les entreprises peuvent donc procéder facilement à des pratiques concertées qui condamnent le consommateur à s’habituer à un prix assez élevé et un service de moindre qualité par un cloisonnement du marché. Une entreprise peut, également, augmenter le prix d’une manière unilatérale en l’absence d’alternative dans le cas où elle acquiert, par exemple, son principal concurrent ou un franc-tireur. L’entreprise agit en dehors de toute pression concurrentielle en laissant le consommateur proie à son excès de pouvoir. Une autorité de la concurrence apprécie donc le marché à partir de son impact sur le consommateur qui est, lui-même, le principal moteur de l’économie.


Le rôle du Conseil de la concurrence n’est plus à démontrer. Le débat sur la place et le statut du Conseil doit être dépassé pour lui permettre d’accomplir sa mission. De deux choses l’une ; soit nous optons pour une économie libérale, auquel cas l’existence d’un Conseil de la concurrence libre, autonome, sans aucune subordination à un ministère, doté de tous les pouvoirs (enquête, perquisition, saisie…) est indispensable pour assurer une cohésion économique et sociale, soit nous retournons à une économie dirigée, perspective non souhaitable à bien des égards. Le Conseil de la concurrence n’est pas une faculté mais une nécessité absolue et la révision de son statut doit être considérée comme une urgence nationale.


Les différentes règles de concurrence tendent à préserver un bien-être du consommateur et assurer des conditions propices à la maximisation des richesses pour les entreprises. Qu’en est-il de l’emploi ? Quelle place dans l’équation concurrentielle ?


II- Emploi : finalité inavouée ?


L’analyse téléologique que nous avons effectuée nous démontre que les différentes théories ne tendent, en aucun cas, à préserver le concurrent, ni l’emploi. Force est de constater que, à l’image du consommateur qui ne revêt pas une importance directe, l’emploi est, lui aussi, un objectif certain par ricochet (A). La concurrence revêt de cette présomption de destruction de l’emploi. Il faut, toutefois, être simples et modestes, vivre avec son temps et ne pas ramer à contre-courant. La concurrence est un vecteur d’innovation qui, elle, modifie la structure de l’emploi dans le monde moderne (B).




A : Concurrence et préservation de l’emploi.


Quel intérêt pour l’emploi dans le contrôle effectué par le Conseil ? Dans l’objectif de la préservation d’un équilibre concurrentiel, les règles de concurrence tendent à protéger indirectement le concurrent. En protégeant la concurrence, on protège le concurrent et, par conséquent, l’emploi.


Par l’interdiction de certains comportements, comme le refus de fourniture, les politiques d’éviction et la discrimination, les règles de concurrence assurent une pérennité de l’entreprise sur un marché et les emplois qui lui y sont attachés. La discrimination est considérée comme la principale cause de l’éviction des opérateurs du marché.


Les pratiques discriminatoires par le prix commencent du haut du processus de distribution. Il s’agit de l’usage que fait une entreprise en position dominante en traitant deux clients en pareilles situations différemment. Le but de ces pratiques est de favoriser des clients fidèles ou importants en leur proposant des prix inférieurs ou des prestations avantageuses. L’analyse économique distingue trois types de stratégies discriminatoires :


La discrimination de premier degré qui consiste à traiter deux clients différemment en fonction de leurs caractéristiques et leurs prix de réserve. Cette discrimination est, en réalité, difficilement applicable par manque d’informations, ex ante, sur les vraies capacités des entreprises.


La deuxième est celle qui pratique des prix différents selon la quantité achetée. Elle est pratiquée à défaut d’une information exacte lui permettant de répartir les clients selon leur capacité d’achat. Et enfin, la discrimination de troisième degré qui, en présence d’informations suffisantes, répartit sa clientèle en fonction de leur capacité d’achat.


Dans le but de permettre à toutes les entreprises, sur un niveau de processus de distribution, de partir sur des base égales et pouvoir, par-là, empêcher l’éviction d’un opérateur, les règles de concurrence interdisent toute pratique discriminatoire par le prix. Cette dernière peut mener à une baisse de pression concurrentielle sur un marché de distribution suite à l’éviction d’un concurrent, et par ricochet, une augmentation de prix.


La discrimination par le produit, quant à elle, attaque directement la raison d’existence d’un opérateur. Sentant la dépendance économique d’une entreprise, la firme dominante pourrait arrêter de fournir l’entreprise en question qui, dans le meilleur des cas, perd une grande partie de son chiffre d’affaires, ce qui bouleverse l’équilibre avec ses concurrents, ou dans le cas extrême, ce qui n’est pas rare en pratique, pousser l’entreprise purement et simplement à quitter le marché.


Les conditions de concurrence reflètent la topographie de la santé économique et social du pays. L’Etat se désengage, certes, avec l’adoption d’une économie libérale, mais ne peut laisser le marché proie à l’égoïsme primaire des humains.


L’Etat, quant à lui ne peut être soumis aux règles de concurrence dans la mesure où il n’exerce pas une activité économique. Toutefois, il peut, par certaines aides, influencer considérablement les conditions de concurrence sur le marché. Il n’existe, malheureusement aucune disposition qui encadre ces aides d’Etat. L’article 43 de la constitution consacre le principe de l’égalité de traitement des entreprises. Rien ne peut justifier un traitement différent pour des entreprises en pareille situation. Les entreprises publiques bénéficient de subventions et/ou des exonérations fiscales, qui les placent dans une position favorable par des coûts de productions moins importants que leurs concurrents directs. Ces aides peuvent constituer des barrières à l’entrée ou pousser des entreprises à quitter purement et simplement le marché. L’Etat, qui est dans une dynamique de désengagement en matière de subvention, doit impérativement encadrer les aides aux entreprises, publique ou privée, de sorte qu’elles soient octroyées de manière discriminante et non discriminatoire.


B : L’innovation et l’emploi


Si nous regardons l’impact de la concurrence d’un regard profane, nous serons tous entrain de tirer à boulet rouge sur le processus. Il est vrai que la recherche d’une efficience allocative, donc la diminution des coûts pour offrir le prix le moins cher, peut être considérée comme contradictoire avec l’objectif de la préservation de l’emploi. Toutefois, c’est méconnaitre le monde de l’entreprise que de penser qu’elles puissent se passer du service d’un salarié productif et indispensable. L’efficience est le contraire du gaspillage, et un employé productif ne peut être considéré comme tel. Il s’agit d’un maillon du processus de production et de commercialisation qui cessera d’exercer ses fonctions. L’entreprise remplace d’habitude cette personne par une machine qui fera le même travail à moindre coûts.


Il est faux de considérer que la concurrence tue l’emploi. La concurrence est un vecteur d’innovation et c’est cette dernière qui tue l’emploi. Il ne s’agit pas d’une disparition du travail mais d’une mutation de l’activité humaine vers moins de pénibilité. Beaucoup de métiers ont disparu à l’image du scribe, par l’invention de l’imprimerie, le développeur de photos sur pellicule ou l’allumeur de réverbères. Des produits également ont disparu et d’autres tendent à disparaitre. A court terme, le chauffeur de tout véhicule, le comptable, les caissières et même le métier de votre serviteur vont disparaitre en laissant place à une structure nouvelle.


Il faut se baser sur la vision schumpetérienne de la concurrence pour comprendre son étendue. La concurrence fait disparaitre des emplois, non pour garder le poste vide, mais du fait de leur obsolescence. Cette destruction est créatrice d’autres secteurs. Il s’agit d’une équation de destruction reconstruction de la structure du marché de l’emploi. Le métier de vendeur, de distributeur de prospectus, de démarcheur à domicile a muté pour devenir le métier du Web master. Il scrute le comportement de tous les individus pour leur proposer des produits à consommer via l’utilisation des algorithmes.


Ces nouveaux secteurs numériques ne sont pas sans failles. Pour la sécurisation des sites, de la navigation, des paiements et des informations personnelles, la nouvelle structure de l’emploi impose la création d’un métier de sécurité internet qui représente un élément important du fonctionnement du marché.


Pour prendre l’exemple de ces plateformes internet, Facebook a employé 17 000 personnes en 2016, Google plus de 72 000 à plein temps. Amazon, pour sa part, a employé en 2014 plus de 160 000 salariés avant de doubler leur nombre, en 2016, pour atteindre 340 000. Ces interfaces font travailler également des centaines d’entreprises qui emploient dans différents marchés connexes.


Pour conclure, il faut savoir que l’intelligence artificielle a remplacé beaucoup de nos métiers. La machine sait très bien collecter des informations, les enrichir et les utiliser au temps utile à une vitesse qui dépasse de loin celle de l’humain. Les nouveaux marchés créent de nouveaux postes et métiers qui requièrent de nouvelles compétences. Il est urgent que notre système scolaire et universitaire adapte son mode de formation aux exigences de l’air de l’intelligence artificielle. La personne formée pour mémoriser et utiliser ses connaissances par une application mécanique ne trouvera aucune place dans ce nouveau marché de travail. La machine le fait mieux que l’homme, plus rapidement et avec une marge d’erreur de 0%. Si nous continuons à créer des concurrents à la machine, en basant notre système sur la mémoire, nous n’aurons aucun poste à proposer à nos enfants. Faire concurrence à la machine est une cause perdue. Il faut, par conséquent, absolument former nos étudiants dans un domaine que la machine n’est pas prête à explorer. Il s’agit de l’esprit critique, réfléchir au-delà de la mémoire, au-delà des acquis théoriques pour assurer l’innovation et leur réserver une place de marque dans le monde de demain.





[1] Crises des Subprimes 2007 et Lehmann Brothers 2008.


[2] D. J. GERBER, « Les doctrines européenne et américaine du droit de la concurrence », in. La modernisation du droit de la concurrence, Dir. G. CANIVET, Paris. L. G. D. J 2006, p. 110


[3] Voir sur ce point D. Gerber, Law and Competition in Twentieth Century Europe: Protecting Prometheus, Oxford, Charon don Press, 1998, p. 240.; W. Möschel, « Competition policy from an Ordo point of view », in A. Peacock et H. Willgerodt, German neo-libals and the social market Economy, MacMillan, London, 1989, p. 142 et s., p.146


[4] I. Lianos, La transformation du droit de la concurrence par le recours à l’analyse économique, Athènes, 2007, Bruylant, p. 305.


[5] H. Hovenkamp, Antitrust Policy After Chicago, 84 Michigan L. Rev. 213, 219 (1984).


 
 
 

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